Histoire du parc communal, le manoir du Vivier

Propriété du département jusqu’en juillet 2010, le parc du Manoir du Vivier situé au cœur du bourg appartient aujourd’hui à la commune de Feuguerolles-Bully. Il couvre une superficie de 3,5 hectares.

Autrefois constitué d’une habitation principale, de bâtiments annexes, de jardins d’agréments, de plusieurs étangs et d’un bois, la propriété fut habitée jusqu’en 1940. Elle fut détruite à la fin de la seconde guerre mondiale lors de la libération de la commune.

Les origines du manoir et ses différents propriétaires

Une des sources principales sur laquelle on peut s’appuyer pour la période antérieure au XXe siècle est une monographie consacrée à Feuguerolles-sur-Orne écrite par le commandant Navel en 1926. Il y répertorie les différents propriétaires qui ont possédé ce qu’il nomme le Manoir du Vivier.

Il indique que cette propriété est d’origine récente. Il précise qu’au XVe siècle, elle était partagée en plusieurs parcelles nommées jardin Brize, jardin Chièvre, jardin fillette,… Une famille importante de la commune la famille Troismonts possède quelques parcelles. Tout au long du XVIe siècle, elle achète les parcelles voisines pour en faire au début du XVIIe siècle, la propriété qu’elle est restée jusqu’à la seconde guerre mondiale.

Le Manoir du Vivier demeure dans la famille de Troismonts jusqu’en 1720 date à laquelle elle le vend à un écuyer Jean Fortin qui ne le conserve que 12 ans avant de le revendre à Jean François Crestey un marchand, bourgeois de Caen dont la petite fille va épouser un Le Bourguignon Duperré en 1768 en l’église de Feuguerolles-sur-Orne. La propriété reste alors dans cette famille jusqu’en 1884 date du décès de Marcellin Le Bourguignon Duperré, professeur de droit.

Après la famille Le Bourguignon Duperré, le domaine passe entre différentes mains, 3 propriétaires en 20 années. En septembre 1918, il est acheté par Charles Lefèvre qui exercera la fonction de maire dans la commune au début des années 20. Après son décès, sa veuve vend la propriété en août 1929, à un anglais fortuné, William Plummer.

En novembre 1933, M. Plummer fait donation de la propriété à Christiane et Odette Rossi, les deux filles de son épouse. Détruit au moment de la libération en 1944, le manoir n’est plus habitable et sera laissé à l’abandon. Ce n’est qu’en décembre 1973, ne sachant probablement que faire de ce domaine, que les deux sœurs Rossi le vendent avec d’autres biens à une société basée dans le Bessin, la société « Urbanisme et construction ».

En février 1991, le conseil départemental décide de participer à l’acquisition de terrains nécessaires à la création de parcs urbains. Profitant de cette orientation politique, un de nos anciens maires, Roger Montigny, qui avait considéré l’importance pour la commune de pouvoir conserver ce patrimoine, réussit après de difficiles discussions à décider des élus du conseil général de procéder à l’achat de la propriété. La vente est signée en mars 1995. En contrepartie pourrait-on dire, la commune est chargée de la gestion, de l’entretien et de l’aménagement du parc afin d’y réaliser un parc récréatif agréable aux habitants tout en y préservant un caractère naturel.

En 2009, la municipalité a fait part de son souhait de racheter le parc au département. Ce fut chose faite le 1er juillet 2010.

Photos et plans cadastraux se complètent pour nous donner une vision des lieux dans l’espace. Il faut imaginer que la rue du Hamel actuelle devant la mairie n’existe pas et que l’entrée de la propriété se situe à peu près à cet endroit. Il faut imaginer également tout le long de la route de Caen, le lotissement actuel du château inclut, un grand mur d’enceinte qui entoure la propriété à l’instar des murs encore présents en limite avec les quartiers du Hamel et de la Bruyère ou comme d’autres propriétés dans la commune.

Grâce à un plan cadastral de 1826, conservés aux archives départementales nous savons que la propriété comprend plusieurs bâtiments, qu’il existe alors deux étangs, des vergers de chaque coté de l’entrée, une cour devant le bâtiment principal coté nord et un jardin coté sud et des taillis au dessus du 2e bassin. On remarque aussi qu’un passage venant en direction de l’église et une fontaine à proximité du premier bassin est la propriété commune de la mairie et du propriétaire du Manoir de l’époque un Le Bourguignon Duperré.

Sur un cadastre plus récent daté de 1935, nous constatons l’apparition de trois « bassins » supplémentaires qui n’existaient pas en 1826. Quelle est leur date de création ? Il reste encore des recherches à effectuer sur l’histoire du parc.

Le manoir pendant la période de l’entre-deux guerres

Monsieur Plummer a acheté cette propriété en 1929. C’est sa femme Louise qui a souhaité « lui redonner son allure jardin à la française qu’il avait totalement perdu » comme l’écrit sa fille Christiane Rossi dans son livre Titiane. Ces photos ne représentent qu’une période d’une dizaine d’années car le manoir est détruit en 1944 au moment de la Libération et la famille Plummer-Rossi est la dernière à y avoir habité. Ils ont quitté le Manoir en 1940, pour une autre propriété à Balleroy. M. Plummer quant à lui, sur l’insistance de sa femme, a regagné l’Angleterre avant la défaite de 1940. Il décède d’une attaque en apprenant que le débarquement a lieu en Normandie.

Le manoir du Vivier est l’une des propriétés les plus importantes de la commune. Les habitants l’appellent « le château ». Un détail mais qui est significatif : on sait que les propriétaires disposent du téléphone. Or dans la commune qui compte à l’époque près de 500 habitants, il n’y a que 3 abonnés : les deux autres sont le boulanger et un entrepreneur de travaux publics.

On sait aussi que les propriétaires avaient un train de vie important. La maison était somptueusement meublée et ils employaient plusieurs personnes à leur service : un chauffeur, des jardiniers, 1 cuisinière et une femme de chambre. Il y a avait également un cours de tennis sur la parcelle qui s’appelait autrefois jardin Brize, qui se trouvait au fond du parc avant la 2e grille d’entrée face au monument aux morts et qui est devenu aujourd’hui le lotissement du château.

Les propriétaires recevaient beaucoup et il arrivait comme le précise Christiane Rossi dans son livre que le parc soit illuminé par des feux de Bengale.

Sa sœur Odette quant à elle, accueillait de temps en temps les enfants du village à l’époque le jeudi, pour des jeux et des goûters.

Les photos de la galerie d’images ci-dessous ont appartenu à la famille Plummer-Rossi. Elles ont été transmises par Christiane Rossi à Mesdames Claire Voize et Marguerite Lucas. Claire Voize de son vivant avait donné des copies à la mairie de Feuguerolles-Bully. Jeannine Mesnil nous a prêté les photos de sa mère Marguerite Lucas qui a travaillé de 1929 à 1940 pour les Plummer-Rossi. Ceux-ci avaient une pleine confiance en elle. Ils lui laissaient d’ailleurs la garde du manoir lorsqu’en hiver ils regagnaient leur appartement parisien.